Un article peut en cacher un autre...

, par Aline Beilin

L’article 24 de la sécurité globale pourrait être retiré... sans être retiré. Car une loi peut en cacher une autre. Mais faut-il tout simplement légiférer sur ce sujet ? La création d’un nouveau délit n’est-il pas constitutionnel que s’il est nécessaire ?

L’article 24 de la loi sécurité globale devait modifier la Loi de 1881 sur la liberté de la presse. Une loi très protectrice des libertés publiques, et en particulier, du droit d’informer.
Mis en difficulté sur cet article, le gouvernement a annoncé que l’article serait réécrit par une commission ad-hoc... suscitant par là la colère des parlementaires qui estiment, conformément aux institutions, que c’est là le rôle de l’Assemblée nationale et du sénat. Voir notre article
Or il apparaît que l’article 25 du projet de loi sur le séparatisme, rebaptisée Loi confortant les principes républicains, qui sera discutée au Parlement prochainement, permet de punir des mêmes faits. [1]

Comparons :
Article 24 de la proposition de loi sécurité globale, alinéa 1

  • I. – Le paragraphe 3 du chapitre IV de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse est complété par un article 35 quinquies ainsi rédigé :
    « Art. 35 quinquies. – Sans préjudice du droit d’informer, est puni d’un an d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende le fait de diffuser, par quelque moyen que ce soit et quel qu’en soit le support, dans le but manifeste qu’il soit porté atteinte à son intégrité physique ou psychique, l’image du visage ou tout autre élément d’identification, autre que son numéro d’identification individuel, d’un agent de la police nationale, d’un militaire de la gendarmerie nationale ou d’un agent de police municipale lorsque ces personnels agissent dans le cadre d’une opération de police. »

Article 25 du projet de loi confortant les principes républicains :

  • Après l’article 223-1 du code pénal, il est inséré un article 223-1-1 ainsi rédigé :
    "Art 223-1-1. — Le fait de révéler, diffuser ou transmettre, par quelques moyen que ce soit, des informations relatives à la vie privée, familiale ou professionnelles d’une personne permettant de l’identifier ou de la localiser, dans le but de l’exposer, elle ou les membres de sa famille, à un risque immédiat d’atteinte à la vie ou à l’intégrité physique ou psychique, ou aux biens, est puni de trois ans d’emprisonnement et 45000 euros d’amende.

Mais l’atteinte à la vie privée n’est-elle pas déjà punie par le code pénal, tout comme l’outrage ou l’injure ? La protection des policiers, et des fonctionnaires en général, n’est-elle pas déjà assurée par le droit pénal ?
Rappelons que le principe de légalité des délits et des peines — principe constitutionnel — reconduit au principe de nécessité des délits et des peines. L’article 8 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen , texte constitutionnel, stipule : " La loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires, et nul ne peut être puni qu’en vertu d’une loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée ".

Notes

[1Consulter le projet de loi et la note de présentation en fichiers joints.

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