Contrôle au faciès. Un procès peut-il en cacher un autre ?

, par Aline Beilin

Les 17 jeunes gens estiment avoir subi, entre 2013 et 2015, dans la cité Rozanoff du 12ème arrondissement de Paris. Mais les 17 requérants, originaires de l’Afrique du nord ou de l’Afrique subsaharienne, veulent que soit évoquée et condamnée la pratique du contrôle au faciès, dénoncée par le Défenseur des droits.
C’est la responsabilité civile de l’Etat qui est ici engagée, l’Etat n’étant pas responsable pénalement.

Pour ces faits de violences et harcèlement, trois policiers ont été condamnés en avril 2018 en première instance. L’enquête pénale avait permis notamment d’établir que les policiers avaient eu recours à la pratique du "contrôle-éviction" : un contrôle d’identité pratiqués au commissariat, à titre préventifs. Les policiers, condamnés en première instance à cinq mois de prison avec sursis et à des peines d’amende ont été jugés en appel : le délibéré sera donné le 23 octobre.
Quelques jours avant le délibéré du procès civil qui sera rendu le 28 octobre.

Les avocats de l’agent judiciaire de l’Etat ont argué du fait qu’il n’y avait pas de preuve de la discrimination. On sait qu’en matière de discrimination ou de harcèlement, la preuve est difficile à faire, puisqu’il faut faire la preuve d’un traitement différencié.

Mais les avocats des requérants, dont Slim Ben Achour [1], avocat très engagé dans la dénonciation des contrôles au faciès, dénoncent un "harcèlement discriminatoire".

Lire l’article de Libération du 1er octobre 2020

C’est l’occasion de relire les arrêts de la Cour de cassation en date du 9 novembre 2016 qui permet d’établir à quelle condition un contrôle d’identité est jugé discriminatoire et engage alors la responsabilité de l’Etat : "un contrôle d’identité fondé sur des caractéristiques physiques associées à une origine réelle ou supposée, sans aucune justification objective préalable, est discriminatoire : il s’agit d’une faute lourde qui engage la responsabilité de l’Etat" (extrait du communiqué de presse). La Cour de cassation, saisie de plusieurs pourvois, s’est prononcée distinctement selon les cas. Il en ressort que "l’Etat a été condamné lorsqu’il n’a pas démontré que la différence de traitement était justifiée par des éléments objectifs".
La Cour de cassation précise le mode de preuve : hors du contexte du travail, c’est bien à la personne qui s’estime victime de la discrimination d’en faire la preuve.
Lire ici le communiqué de la Cour de cassation, et les arrêts du 9 novembre 2016

Notes

[1l’avocat publie une chronique judiciaire dans le journal L’humanité

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