Pourquoi les peines des époux Fillon ont-elles été réduites en appel ?

, par Aline Beilin

Pourquoi les juges d’appel ont réduit la peine à laquelle ont été condamnés François Fillon, Pénélope Fillon et un tiers comparse, Marc Joulaud ?

En première instance, en juin 2020, l’ex-Premier ministre avait été condamné à cinq ans de prison dont deux ans ferme, à 375000 euros d’amende et une peine d’inéligibilité de dix ans. Son épouse Pénélope, qu’il employait fictivement aux frais de l’Assemblée nationale, avait été condamnée à trois ans avec sursis, à 375 000 euros d’amende. Aux peines d’amende s’ajoutent les sommes à rembourser à l’Assemblée nationale (800 000 euros)

La Cour d’appel en ramenant la peine à quatre ans de prison dont un ferme, permet l’exécution de la peine sous bracelet électronique, si le juge de l’application des peines en décide ainsi.

Les juges d’appel lors du délibéré a justifié cette réduction en prononçant la relaxe des chefs sur une des périodes en cause : sur la période 1998-2002, les traces et preuves ne peuvent être aussi aisément trouvées, eu égard à l’ancienneté des faits, et ils ont donc choisi de relaxer sur cette période, tout en maintenant la culpabilité sur tout les reste.
Dans cette hypothèse, les juges jugent en droit, le doute profite à l’accusé. Justice a été rendue.

Mais les commentateurs analysent la décision autrement.

  • Commentaire d’un journaliste de Libération, qui remet en cause cet argument destiné selon lui à réduire la peine pour la rendre aménageable : « C’est un grand classique du genre en matière d’affaires politico-financières. La justice française frappe fort en première instance, puis met la pédale douce en appel, histoire d’éviter aux cols blancs d’aller au ballon. »
  • Autre commentaire, très différent, dans une tribune publiée dans le Figaro cette fois, écrite par Hervé Lehman, ancien juge d’instruction et avocat au barreau de Paris, auteur notamment de Le Procès Fillon (éd. du Cerf, 2018), ouvrage à décharge : « les juges se montrent dorénavant d’une grande sévérité avec les politiques. Quatre années de prison, pour une pratique qui était assez généralisée il y a encore une dizaine d’années, c’est une peine lourde. »

Nous revenons là à la question récurrente : faut-il juger les hommes politiques comme les autres justiciables, ou appliquer la loi pénale strictement au nom de l’exemplarité, de l’honnêteté ou de la vertu politique ?

Les époux Fillon se pourvoient en cassation... Cela leur permet de conserver leur liberté d’aller et venir et de repousser le moment de la peine.

Voir en ligne : A lire dans le Monde

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