Irresponsabilité, inviolabilité, immunité....

, par Valérie Marchand

L’ancien Président de la République, Nicolas Sarkozy a été convoqué comme témoin devant la 32e Chambre du tribunal correctionnel de Paris au procès des sondages de l’Elysée et a refusé de répondre aux questions, au motif que, selon "les constitutionnalistes", sa comparution violerait la Constitution.

Roseline Letteron, Professeure de droit public, Sorbonne-Université fait un point très utile sur la question.

>>>Pour accéder directement à l’article de R. Letteron>>>

L’article 67 de la Constitution dispose que "le Président de la République n’est pas responsable des actes accomplis en cette qualité". [1] Un témoignage du Président ne peut donc "durant son mandat" être requis, devant aucune juridiction ; Le Président ne peut pas non plus faire l’objet d’une action, d’un acte d’information, d’instruction ou de poursuite.

L’ article 67 dispose également que durant ce mandat "tout délai de prescription ou de forclusion est suspendu" et il se clôt ainsi : "Les instances et procédures auxquelles il est ainsi fait obstacle peuvent être reprises ou engagées contre lui à l’expiration d’un délai d’un mois suivant la cessation des fonctions".

Si la fonction du principe d’irresponsabilité est de sanctuariser la fonction présidentielle durant la durée du mandat , l’inviolabilité qui en découle n’est en fait qu’un privilège de juridiction.

Selon Roseline Letteron," la rédaction de l’article 67 montre clairement que ce privilège de juridiction n’a qu’un temps, puisque le délai de prescription est simplement suspendu. En effet, si le Président bénéficiait d’une inviolabilité "à vie" la prescription serait purement et simplement supprimée. De même est-il précisé que les procédures auxquelles il est fait obstacle peuvent être engagées ou reprises un mois après la cessation de ses fonctions."

La constitution distingue donc bien entre irresponsabilité et inviolabilité : " Si l’irresponsabilité du Président s’étend à tous les actes commis durant ses fonctions, le privilège de juridiction prend fin avec la fin de celles-ci. Dans la mesure où Nicolas Sarkozy n’est pas lui-même poursuivi dans l’affaire des sondages, rien ne s’oppose donc à ce qu’il soit entendu comme témoin. "

L’auteure rappelle également que le terme d’immunité ne figure pas dans la Constitution de 1958.

Voir en ligne : Il faut sauver le soldat Sarkozy, par Roseline Letteron, Professeure de droit public

Notes

[1Il existe deux exceptions à ce principe : l’éventuelle compétence de la Cour pénale internationale (art. 53-2) ou la destitution du président par la Haute Cour pour "manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l’exercice de son mandat" (art. 68).

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