A quelle condition une association peut-elle être dissoute ?

, par Aline Beilin

Liberté d’expression, liberté d’association vs ordre public ?C’est à l’intérieur de cette tension que se situe la décision du Conseil des ministres du 28 octobre 2020 de dissoudre l’association BarakaCity, accusée d’inciter « à la haine, entretenait des relations au sein de la mouvance islamiste radicale, se complaisait à justifier des actes terroristes » (propos du ministre de l’intérieur. Mais la décision est aussi l’occasion de revenir sur la disctinction des ordres administratif et judiciaire.

Il s’agit ici d’une dissolution administrative et non judiciaire. La décision a été prise à la suite de l’attentat contre Samuel Paty.
Driss Yemmou a fondé cette association qui se présente comme une organisation humanitaire : le ministère l’accuse de « participer à la diffusion d’une idéologie appelant à la haine, à la discrimination et à la violence ». Par ailleurs, Driss Yemmou ( Idriss Sihamedi sur Twitter) est soupçonné de harcèlement en ligne envers un ex-journaliste de Charlie Hebdo (Zineb El Rhazoui).

L’association BarakaCity était sous surveillance depuis plusieurs années. Le journal Libération a proposé un focus sur ce point. A lire ici.
Cependant, le parquet de Paris a classé sans suite en 2019 une enquête préliminaire ouverte trois ans auparavant pour « financement de terrorisme » à l’encontre de cette association.
BarakaCity est défendue notamment par William Bourdon. Celui-ci argue que « l’association intervient dans une vingtaine de pays, distribue des millions de litres d’eau en Mauritanie ». Les avocats ont saisi le Défenseur des droits, la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CCDH) et le rapporteur spécial sur la liberté de religion des Nations unies.

La question qui se pose ici est celle des preuves de l’activité illicite de l’association Ces preuves, exigées par toute procédure judiciaire, ne le sont pas avec la même force lors d’une décision adminsitrative. Le ministre a affirmé que la décision était étayée et fondée.
C’est ce dont pourrait être juste le Conseil d’Etat, si l’ONG fait appel devant le juge administratif de la décision de dissolution.

La décision de dissoudre une association peut être prise sur décision du Conseil des ministres (décision politique), sur décision judiciaire ou, bien sûr, sur décision de ses propres membres.

Le site service public.fr fait le point sur les conditions de dissolution.

En France, la loi du 1901 est une loi importante qui pose en droit la liberté d’association.
Mais le principe d’ordre public est à l’évidence un principe fondamental, que la jurisprudence du Conseil d’Etat définit notamment comme « le bon ordre, la sécurité, la salubrité et la tranquillité publiques ».
En ce sens, le cas présent est une énième illustration de la tension entre liberté et sécurité.

Partager

Imprimer cette page (impression du contenu de la page)