Amende fortaitaire de 200 euros pour usage de stupéfiants. Efficacité ou enfumage ?

, par Aline Beilin

Cette amende vise au premier chef les consommateurs les usagers de cannabis ou de cocaïne. Elle était en vigueur dans certaines villes de France, comme Reims ou Rennes. Elle est, à compter du 1er septembre 2020, généralisée à l’ensemble du territoire.

Le gouvernement dit vouloir l’appliquer avec vigueur. Lire ici les propos de M. Darmanin, ministre de l’Intérieur, le 2 septembre 2020.

L’amende forfaitaire délictuelle, d’un montant de 200 euros, est donc étendue à l’usage de stupéfiants.
Si l’amende est réglée sous 15 jours, elle est ramenée à 150 euros. Il n’y a alors pas de poursuites judiciaires (le paiement "éteint l’action publique"). En revanche, si elle n’est pas réglée sous 45 jours, elle est majorée et atteint 450 euros et peut donner lieu à des poursuites judiciaires, si le Procureur de la République le juge opportun, devant le tribunal correctionnel.
En effet, l’amende sanctionne bien un délit, comme le stipule code de la santé publique, dans son article L3421-1 : « L’usage illicite de l’une des substances ou plantes classées comme stupéfiants est puni d’un an d’emprisonnement et de 3750 euros d’amende ». Or Le code de procédure pénale ouvre la possibilité qu’un délit soit puni d’une amende forfaitaire articles 495-17 et suivants.

Ce procédé a déjà fait l’objet de débats : l’efficacité fait débat, tant sur le plan judiciaire que sur celui de la politique de santé publique.

  • En 2018, l’élargissement de l’amende forfaitaire a été débattue au Sénat. La mesure était présentée par la ministre de la Justice d’alors (N. Belloubet) comme un moyen permettant de simplifier le travail des forces de l’ordre et de la justice en recourant à une automatisation des peines. Le débat a permis de soulever de nombreux problèmes. Le code de procédure pénale exclut de cette amende les mineurs et les cas de récidive. Comment les forces de l’ordre vont-elles s’assurer au moment de verbaliser que la personne n’est pas en état de récidive ? Quelques échos de ce débat de 2018, toujours d’actualité : sur le site Dalloz-actualités ici ou .
  • La politique répressive n’a pas eu les effets souhaités par la puissance publique : la France reste un pays à forte consommation de stupéfiants, relativement aux autres pays d’Europe par exemple. De fait, De nombreuses associations et syndicats, dont la Ligue des droits de l’Homme et le Syndicat de la magistrature, ont publié un communiqué pour dénoncer une mesure inefficace, purement répressive, et justifiée par une communication politique sécuritaire, alors même qu’une véritable politique publique devrait être conduite sur la question de la consommation de stupéfiants. Le communiqué et l’argumentaire complet de ce collectif peut être lu en pj. Ecouter Katia Dubreuil, présidente du Syndicat de la magistrature, interrogée sur France Inter le 1er septembre 2020 ici.
    La Ligue des droits de l’Homme avait publié, dès 2018, un livre blanc sur cette mesure aujourd’hui à nouveau en débat. A lire ici

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