Loi bioéthique : nouvel examen, questions anciennes

, par Aline Beilin

Le texte de loi sur la bioéthique a été voté par l’Assemblée nationale en première lecture le 15 octobre 2019, puis adopté par les sénateurs qui l’ont amendé le 4 février 2020. Le texte est donc passé en Commission à l’Assemblée nationale début juillet et les députés ont réintroduit les dispositions amendées ou rejetées par le Sénat. Petit point sur les sujets en tention.
L’élaboration de la loi peut être suivie sur le site de l’Assemblée nationale (AN) ici.

  • Si l’ouverture de la PMA aux couples de femmes recueille l’accord de tous les parlementaires, c’est la question du remboursement qui fait débat. L’Assemblée nationale propose que la PMA soit prise en charge intégralement par la Sécurité sociale, quel que soit le profil des patientes.
  • rétablissement de la possibilité pour les femmes de faire prélever et congeler leurs ovocytes en vue d’une grossesse ultérieure (article 2)
  • En ce qui concerne l’établissement de la filiation des enfants nés de PMA, c’est le principe de l’établissement de la double filiation qui a été retenu par l’AN : la femme qui accouche devienne mère (selon l’adage "c’est la mère qui accouche"), et l’autre mère, parente « d’intention » ferait une reconnaissance conjointe anticipée en même temps qu’elles consentent au don : cette reconnaissance permettrait l’établissement de la filiation. Le Sénat, quant à lui, restait favorable à l’établissement de la filiation par filiation adoptive.
  • Extension du diagnostic préimplantatoire (DPI), à la recherche d’aneuploïdie. On nomme ainsi une anomalie du nombre de chromosomes. Or ici le recherche ne porte que sur des chromosomes non sexuels, afin d’éviter toute démarche de discrimination sur le critère du sexe, de nature eugéniste. Cela n’empêche pas les opposants au texte de l’attaquer au nom de la lutte contre l’eugénisme... La disposition législative est aussi défendue par des médecins qui voient dans l’élargissement de la pratique des tests génétiques la possibilité de mettre en place les moyens thérapeutiques très tôt, d’éviter des souffrances et de mieux soigner.
    Le journal Le monde du 27 juillet 2020 a publié deux tribunes qui éclairent les débats, l’une signée par 4 rapporteurs de la loi [1] et l’autre par un généticien et le directeur général d’AFM Téléthon [2]
  • Autre sujet de vif débat : la méthode ROPA... Le gouvernement y est opposé, mais les députés l’ont adoptée.
    La méthode « ROPA » pour Réception des Ovocytes de la Partenaire, porte aussi le nom de "maternité partagée". Elle consiste à inséminer l’ovocyte fécondé d’une femme des deux femmes du couple dans l’utérus de l’autre. Celle qui est enceinte l’est grâce à l’ovocyte de l’autre membre du couple. La méthode permet de partager davantage la conception d’un enfant, mais remet en question l’anonymat entre donneur et receveur, qui est la règle dans notre droit. Le recours au tiers donneur anonyme est maintenu bien sûr pour le don de spermatozoïdes.
    Les opposants à l’ouverture de la PMA aux couples de femmes veulent y voir une forme de légalisation de la GPA (voir leur réaction dans cet article du Figaro).
    Mais ici la gestatrice est bien la mère de l’enfant dont l’autre membre du couple est la génitrice. La double filiation maternelle est alors établie, par la déclaration anticipée, avant que l’insémination ne soit tentée. Le gouvernement a opté pour cette solution : les mentions "mère" et "mère" apparaissent sur l’acte de naissance de l’enfant (voir cet article du Monde du 26 août 2019 rappelant cette décision)
  • Un amendement a été voté à l’AN sur le don du sang, supprimant la période d’abstinence de quatre mois exigée aujourd’hui pour les donneurs homosexuels.
  • Ont été rejetés par l’AN l’ouverture de la PMA aux personnes transgenres et la PMA post mortem ( réalisée avec les gamètes d’un conjoint décédé)

Notes

[1Philippe Berta, député (MoDem) du Gard, rapporteur du projet de loi bioéthique ; Coralie Dubost, députée (LRM) de l’Hérault, rapporteure du projet de loi bioéthique ; Hervé Saulignac, député (PS) de l’Ardèche, rapporteur du projet de loi bioéthique ; Jean-Louis Touraine, député (LRM) du Rhône, rapporteur du projet de loi bioéthique.

[2Jean-Louis Mandel, professeur honoraire de génétique humaine au Collège de France, président de la Fondation maladies rares ; Christian Cottet, directeur général de l’AFM-Téléthon

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